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« Le BIM, ce n’est pas un logiciel, c’est une nouvelle manière de travailler »

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Le BIM (Building Information Model), ou maquette numérique, prend de l’ampleur notamment dans le cadre des marchés publics. De quoi s’agit-il au juste ? Quels bénéfices pour les entreprises ? Gwenael Bachelot, spécialiste du sujet chez Autodesk, répond à nos questions.

 

Gwenael Bachelot est responsable de l’avant-vente AEC (architecture, ingénierie et construction) pour l’Europe du sud chez Autodesk, éditeur de logiciels spécialisé, entre autres, dans le BIM.

 

A lire sur emedia : Petit lexique du smart building

 

Qu’est-ce que le BIM ?

 

Le BIM, ce n’est pas un logiciel, c’est un process qui s’appuie sur des logiciels. Passer au BIM, cela veut dire revoir la façon dont on conçoit, mais aussi, et c’est peut-être encore plus important, la façon dont on organise le travail.

 

Concevoir en BIM, c’est très souvent concevoir en 3D, par opposition à un travail en 2D, et, surtout, c’est associer beaucoup d’informations à chacun des éléments que l’on dessine. Par exemple, à une fenêtre, peuvent être associés des paramètres de performance énergétique, le fait qu’il s’agisse de double ou de simple vitrage, la présence d’une isolation phonique ou thermique spécifique… Et c’est la même chose pour les murs ou les portes. Ces objets ont par conséquent une « intelligence » supplémentaire car, une fois que tous ses éléments sont renseignés, il est, par exemple, possible de connaître la performance globale du bâtiment.

 

Autre exemple avec une porte qui, évidemment, est située dans un mur. Quand on travaille en BIM, on sait que cette porte est dans le mur et, si on cherche à la déplacer, on ne pourra pas le faire au milieu d’une pièce : elle va coulisser le long du mur. Ce genre d’intelligence guide le concepteur et permet d’aller beaucoup plus loin dans l’analyse de ce que l’on est en train de faire.

 

Construire virtuellement pour éviter les retards sur le chantier

Dans une démarche BIM, on cherche à éviter au maximum le fait de recréer la même information. On estime que, dans un processus de construction normal, on saisit en moyenne 17 fois le même renseignement. On perd beaucoup de temps et on prend le risque de ne pas dessiner exactement de la même façon et donc de perdre en qualité d’information.

 

En concevant en BIM, on peut confronter toutes les conceptions. Dans le bâtiment, il y a beaucoup d’intervenants sur un même projet et ils n’ont pas toujours à disposition ce qu’ont fait les autres, si bien que tout le monde travaille un peu en parallèle. Dans un processus standard, lorsque l’on rapproche toutes ces conceptions pour savoir où l’on va, on tombe sur des choses qui ne sont pas cohérentes entre elles… Mais on ne les trouve pas toutes avant d’arriver sur le chantier et cela pose bien sûr un problème. Il peut, par exemple, s’agir d’une gaine de climatisation qui doit traverser un mur porteur. Si l’on s’en rend compte sur le chantier, alors que le mur porteur est déjà construit, il faut retourner vers le bureau d’études pour savoir comment gérer le problème, et quel changement doit être apporté.

 

Travailler en BIM permet d’identifier ces erreurs avant même le début du chantier. Certains clients nous disent que ça permet de construire virtuellement avant même de construire concrètement et donc de gagner du temps en évitant des décalages de planning.

 

Quelles solutions proposez-vous aux entreprises qui souhaitent passer au BIM ?

 

Le BIM s’appuie sur des logiciels. Il en existe une myriade, mais nous pouvons en citer quelques-uns. Le premier, c’est Revit, un logiciel Autodesk qui permet de concevoir des bâtiments : la structure, l’architecture, mais aussi tout ce qui est climatisation, électricité et plomberie. InfraWorks 360 s’occupe de l’extérieur du bâtiment : routes, ponts, terrain… Mais il existe aussi d’autres outils comme Navisworks qui permet de faire la synthèse de données issues de différents logiciels et de les regrouper au sein d’une maquette numérique unique afin de faire des détections d’interférences ou d’incohérences et donc de regarder où peuvent se poser des problèmes.

 

Optimiser la construction et la gestion du bâtiment

Le BIM apporte de multiples avantages lors de phases de conception, mais après ?

 

Après la conception, il y a la construction. Le process BIM permet de mieux planifier et de construire avec moins d’imprévus. De plus en plus, on cherche à avoir des constructions qui vont vite et qui ne perturbent pas l’environnement : on veut éviter les poussières, le bruit, l’attente des camions, les livraisons inattendues… On veut avoir une démarche à flux tendus, ou presque, sur le chantier. D’ailleurs, on le constate : maintenant, sur beaucoup de chantiers, les fenêtres des premiers étages sont fixées alors que les étages supérieurs ne sont pas encore montés. On essaye d’optimiser au maximum la construction et c’est uniquement possible dans le cadre d’une démarche BIM qui permet de savoir exactement ce qui doit être fait et à quelle étape.

 

Ensuite, il y a tout ce qui est gestion du bâtiment : quand on a fini de construire, on peut livrer à la personne qui s’occupe de la maintenance une maquette 3D intelligente. Ainsi, lorsqu’il y aura des choses à rénover ou réparer, il disposera d’un référentiel complet de l’existant qu’il pourra lier à des solutions de gestion de la maintenance.

 

Le BIM a-t-il poussé la porte des industries ?

 

Toutes les industries n’y sont pas encore passées, mais pour les majors de la construction, c’est une réalité depuis plusieurs années. Quand on fait l’effort de se mettre au BIM, on se rend compte de tous les bénéfices et on ne revient pas en arrière. Et, parmi ces bénéfices, le premier est sans doute la prédictibilité et la réduction du nombre d’imprévus, ce qui est évidemment très bon pour le respect des plannings.

 

Passer au BiM necessite de revoir tous les process de l’entreprise

Les freins à lever sont encore nombreux. Passer au BIM, cela veut dire acquérir de nouveaux logiciels et former les personnels à leur utilisation. Ce n’est pas un détail car il faut que l’entreprise soit prête à s’investir dans cet apprentissage. Mais le plus important, c’est sans doute de revoir tous les process à l’intérieur de l’entreprise. Des gens qui ont l’habitude de travailler d’une certaine manière depuis des années doivent réfléchir à l’ensemble des workflows, il faut repenser les limites du travail et des responsabilités de chacun. C’est difficile, c’est une vraie gestion du changement à prendre en compte au plus haut niveau d’une entreprise.

 

« Passer au BIM, c’est avoir une vraie démarche de gestion du changement, propre à chaque entreprise. Il faut qu’elle soit supportée par les plus hautes fonctions. »

 

Nous disposons de méthodes pour éclairer nos clients sur ces défis et leur ouvrir les yeux sur les façons dont ils peuvent utiliser ces logiciels dans leurs procédures. Nous organisons par exemple des réunions pendant lesquelles nous essayons de faire participer l’ensemble des responsables d’une entreprise pour les aider à identifier tous les problèmes qui vont se poser quand ils vont passer au BIM et à mettre en place des solutions pour que ça se passe le mieux possible.

 

Vers le boum du bim ?

Ces dernières années, on note une accélération notable. Les précurseurs ont montré qu’il y avait un intérêt. Aujourd’hui, la question n’est plus : « faut-il passer au BIM ? » mais « comment faire ? ». On sait que c’est possible, on voit d’ailleurs autour de nous des pays qui ont des obligations légales pour passer à la maquette numérique, comme c’est le cas au Royaume-Uni.

 

Ce que l’on note aussi, c’est que, si les grandes entreprises sont les premières à être passées au BIM, de nombreuses PME entament également cette démarche, avec beaucoup de succès. En fait, comme les géants de la construction travaillent avec le process BIM, cela a un impact sur leurs sous-traitants qui doivent eux aussi évoluer pour continuer à travailler avec ces grands groupes.

 

Les différents acteurs de l’écosystème sont-ils bien informés ?

 

Tout le monde a saisi qu’il se passait quelque-chose dans cette industrie. Néanmoins, il y a toujours des pionniers et d’autres qui s’y mettent un peu plus tard. La définition du BIM n’est pas la même pour tout le monde. Pour certains, utiliser un logiciel comme Revit, c’est faire du BIM. Ce n’est pas tout à fait vrai : ce n’est pas parce qu’on change de logiciel qu’on se met tout d’un coup à faire du BIM.

 

Si les utilisateurs de nos logiciels sont plutôt bien informés, les donneurs d’ordre le sont moins. Les clients de nos clients ne voient pas les bénéfices, le fait qu’il y ait moins d’erreurs, que ça soit plus facile à utiliser ou que ça permette plus de choses. Il y a donc encore nécessaire de les informer.

 

Enfin, aujourd’hui, quand on parle BIM, tout le monde entend ce qui est à l’intérieur du bâtiment. Pourtant, ce qui est à l’extérieur profite aussi beaucoup de cette approche. Pour les infrastructures, routes ou ponts, par exemple, il y a un vrai avantage à travailler en BIM et ça, ce sont des changements qui sont en train de s’effectuer maintenant : autant le bâtiment a pris un peu d’avance, autant le monde des infrastructures est en train de basculer.

 

A lire aussi : Foundation, ingénierie numérique pour le bâtiment : « Il y a encore un an et demi, on nous prenait pour des fous »


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