Comment créer un environnement de travail stimulant grâce au numérique ? Quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour déployer des tablettes en classe ?
Le vendredi 11 mars 2016, à l’occasion du salon Educatec-Educatice, Arnaud Lecuyer, professeur d’Histoire-Géographie et directeur des systèmes d’information du groupe scolaire La Salle de Lille, est revenu sur l’une des ambitions de son établissement : équiper chaque élève d’un iPad. Aujourd’hui, 6 ans après le début du projet, 1 500 tablettes ont déjà été déployées auprès des 2 500 élèves, dont le niveau va du primaire au BTS. Que retenir de cette expérience ? Arnaud Lecuyer met en avant cinq points essentiels.
1/ BIen cerner les contours de son projet
Cela peut sembler une évidence mais, dans un groupe scolaire de plus de 2 000 élèves, un déploiement auquel on n’a pas suffisamment réfléchi en amont est nécessairement voué à l’échec, explique Arnaud Lecuyer.
En 2010, lorsque débute le projet, c’est une classe de 1ère sciences et technologies de la gestion (STG) qui est choisie comme pilote. L’échelle est alors modeste, avec une trentaine d’élèves et une dizaine de professeurs mobilisés.
Une fois le choix du matériel effectué, c’est sur les contenus qu’il a fallu se pencher, l’ensemble des manuels scolaires ayant été remplacés par les tablettes. Les professeurs impliqués dans ce projet pilote ont alors dû créer de nouveaux contenus… Ce qui a suscité une émulation entre eux et les a incités à échanger leurs bonnes pratiques :
« La tablette, c’est le partage. L’année de son arrivée a été ma meilleure année d’enseignant, je n’ai jamais autant échangé avec mes collègues ! »
L’année suivante, 9 classes ont été équipées et, la troisième année, la généralisation était en marche. Aujourd’hui, le groupe scolaire est équipé de 1 500 iPad pour 2 500 élèves. A ce stade, l’accompagnement par un intégrateur devient nécessaire… Mais pas question pour autant de se laisser dépasser par la technique, avertit Arnaud Lecuyer :
« Le couple pédagogie/technique doit être en harmonie. »
2/ Mettre en place une pédagogie adaptée à l’outil
« Les élèves d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’il y a 10 ou 20 ans. Leur environnement a changé, le numérique a bouleversé les choses. Désormais, au lieu de leur dire “N’allez pas sur Wikipédia pour faire vos exposés”, on les accompagne dans l’utilisation d’Internet. Les tablettes permettent d’adapter les pédagogies aux élèves d’aujourd’hui. »
Pour autant, la tablette n’est pas perçue comme l’alpha et l’omega de la révolution des pédagogies : la clé de la transformation reste l’enseignant… Un enseignant qui doit changer de posture dans sa salle de classe et laisser davantage d’autonomie aux élèves dans l’organisation de leur travail.
3/ Accompagner les professeurs
« L’équipe de pilotage doit avoir un rôle moteur dans la collaboration entre les professeurs. »
Si, la première année, les professeurs concernés par le projet faisaient partie des plus innovants, la généralisation progressive est allée de pair avec l’inclusion d’enseignants moins au fait, voire récalcitrants à l’usage des tablettes. Lors de la troisième année du projet, près de 200 professeurs étaient impliqués. Dans ces conditions, un programme de formation et d’accompagnement adapté au niveau de chacun s’est révélé nécessaire pour tous les embarquer.
4/ Casser les murs
C’est sans doute l’un des aspects les plus contraignants. Au-delà de la formation des enseignants – qui les incite à dépasser le cadre traditionnel dans lequel ils évoluaient auparavant – c’est l’organisation même de l’établissement scolaire qui doit être revue. L’emploi du temps classique, avec des créneaux horaires dédiés à des cours précis, rend difficile l’organisation de temps d’échanges entre professeurs. Arnaud Lecuyer explique ainsi devoir organiser de façon ponctuelle des moments entre enseignants durant les pauses de midi ou lors de journées intégralement banalisées.
5/ réflechir à la logistique
A tous les points précédents s’ajoutent de nombreux aspects annexes mais néanmoins importants, tels que l’infrastructure réseau et serveur, le financement des tablettes, la gestion du parc ou encore la rédaction d’une charte d’utilisation à destination des élèves.
« Ne pas prendre en compte l’installation d’un réseau Wi-Fi performant, c’est tout simplement rendre inutile tout le projet d’équipement et pédagogique ! »
Autre exemple : chaque année, le groupe scolaire reçoit 400 nouvelles tablettes pour renouveler le matériel. Cela se fait généralement en été… quand il y a peu de personnel disponible. Le stockage d’un tel volume de tablettes, leur mise en sécurité, leur étiquetage et leur suivi sont donc autant de points à anticiper pour qu’élèves et professeurs puissent profiter au mieux de la transformation pédagogique que permet le numérique.
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=> Didier Siran – Avec le numérique, les élèves sont contents de venir en classe !
=> Nicolas Prono – Le numérique pour accompagner les élèves porteurs de troubles de l’apprentissage